On aime parfois se faire peur en imaginant des personnages ou des histoires un peu étranges. Elles mêlent les rêves, les réalités de notre monde mais aussi celles de mondes imaginaires ou lointains. C’est souvent le cas dans le théâtre nô.
Le théâtre nô a le goût du mystère et de l’étrange. Il a été très apprécié au Japon par les militaires et les princes des 14e et 15e siècles. Avec de la musique, de la danse, des histoires, des chants poétiques, il met le plus souvent en scène un fantôme qui, par amour ou par vengeance, revient parmi les vivants. Il doit régler quelques comptes, dévoiler des secrets ou réparer une faute…
La musique, les masques, les gestes lents des acteurs, leurs costumes somptueux, permettent aux spectateurs de passer dans un temps qui n’est ni celui de la vie quotidienne ni celui de l’au-delà. Les émotions y sont intenses et les sentiments puissants – qu’il s’agisse de tendresse ou de violence, de ruse ou d’égarement.
Les costumes et les masques portés par l’acteur principal sont spectaculaires mais c’est surtout l’art de les rendre expressifs qui suscite l’admiration et le plaisir des spectateurs.
Jouer avec la lumière de la scène pour faire glisser des ombres sur le masque, adoucir une expression ou au contraire la rendre terrifiante n’est pas facile ! L’art du nô se transmet patiemment de maître à disciple, de père en fils le plus souvent. Les masques aussi se transmettent avec un soin particulier. Ils sont maniés avec un très profond respect.
Dans le théâtre nô, il n’y a pas de décor sur la scène. Les costumes sont donc très importants. Tous leurs motifs tissés ou brodés ont une signification. En regardant le costume, on peut ainsi savoir si le personnage est un homme ou une femme, on peut être renseigné sur son âge, son humeur, la saison où se passe l’action de la pièce, etc.
De la même façon, chaque masque illustre un personnage spécifique : homme ou femme, jeune ou âgé, figure réelle ou imaginaire… Il en existe 138 types différents ! Le masque n’a pas pour fonction de cacher le visage, il aide à transformer l’acteur à qui il permet de devenir réellement le personnage qu’il joue. Avant d’en couvrir son visage, on salue son masque et on le contemple.
Observe bien
Les masques de nô sont assez petits et ne couvrent pas tout le visage. Sculptés dans le bois de cyprès puis soigneusement peints, ils sont percés par 7 orifices : les yeux, les narines et la bouche mais aussi, au niveau des tempes, deux encoches qui permettent de fixer un lien et nouer le masque derrière la nuque. La forme de la bouche, largement ouverte ou discrètement souriante, transforme la voix de l’acteur. Il lui faudra donc travailler sa diction pour être entendu et compris de son auditoire. Les yeux sont très petits, trop petits même pour voir normalement. L’acteur devra mémoriser la taille du plateau sur lequel il évolue. Cela impose une très grande maîtrise des moindres gestes et déplacements.
Le savais-tu ?
L’art du théâtre nô était très apprécié par les grands seigneurs militaires du Japon des 14e et 15e siècle qui se sont aussi appliqués à soutenir la vie artistique. Par leurs commandes mais aussi leurs pratiques personnelles, ils vont financer de nombreux artistes et artisans hautement spécialisés.
Petit détail : tous les rôles sont joués par des hommes, y compris les personnages féminins !