Courtisanes légendaires, jeunes acteurs du théâtre kabuki traditionnellement travestis en femmes, ou simples filles de l’ombre, les « Images du Monde flottant » mettent en scène, dans leur destinée flamboyante ou précaire, tous ces hôtes des quartiers de plaisir installés dès le 17ème siècle dans les grandes villes du Japon, où ils étaient assignés à résider par les autorités impériales. Adulés par leurs contemporains, en dépit ou à cause de la menace qu’ils représentaient pour l’ordre politique et moral en vigueur, les plus talentueux d’entre eux surent faire partager tous les raffinements de l’art et de l’amour aux nouvelles classes sociales promises à l’avenir, qui émergèrent au XVIIe et au XVIIIe siècle au sein du Japon féodal. C’est autour d’eux aussi que les artistes les plus célèbres de l’époque, Masanobu, Harunobu, Utamaro… ont porté à un niveau de perfection égal à leur séduction, des techniques comme celle de l’estampe polychrome, ou conquis de nouvelles expressions artistiques tels que la représentation de la perspective ou l’art du portrait psychologique. Cette effervescence créative a permis l’irruption de valeurs modernes : l’épanouissement de l’individu autour d’exigences nouvelles de bonheur, la place de la femme dans la société et la recherche de tous les plaisirs de la vie, ce dont témoigne avec liberté et exubérance l’art des estampes érotiques ou shunga.
Auteur : Hélène Bayou